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Le sport en prison : occuper et réinsérer avec l’Ufolep

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Occuper les détenus, améliorer leur santé et préparer leur réinsertion sont les principaux objectifs assignés au sport en prison. Qui fait néanmoins toujours l’objet de préjugés que l’Ufolep combat à travers ses interventions.

 

Surpopulation d’un côté, construction de nouveaux établissements favorisant davantage l’activité sportive de l’autre. Pour le sociologue Laurent Gras, ce sont les deux principales évolutions – en partie contradictoires – de l’univers carcéral depuis la parution, en 2005, de son ouvrage de référence sur Le sport en prison (L’Harmattan). Au 1er décembre, on comptait ainsi 72 836 détenus pour 60 698 places, en raison d’un taux d’occupation qui atteint et dépasse parfois les 200 % en maison d’arrêt : une surpopulation dénoncée par l’Observatoire international des prisons et la contrôleuse des lieux de privation de liberté. Parallèlement, bien que leur nombre soit insuffisant, les nouveaux établissements sont conçus avec « de vraies infrastructures sportives : grands terrains de football, gymnases, et depuis cinq ou six ans des city-stades », détaille Laurent Gras, aujourd’hui en charge d’un observatoire de la formation à l’École nationale d’administration pénitentiaire (Enap) d’Agen.

Santé.« L’administration pénitentiaire a également souhaité diversifier les activités sportives, en sortant un peu du duo muscu-foot, qui malgré tout demeure central », observe Laurent Gras. Côté récréationnel, on retrouve volontiers du ping-pong, une table ayant l’avantage d’occuper peu de place. Les sports d’équipe peuvent plus compliqués à organiser, en particulier en maison d’arrêt où les détenus restent moins longtemps, sauf pour des variantes à effectif réduit comme le basket 3x3. En revanche, leur vertu socialisante est évidente. L’administration pénitentiaire favorise également depuis plusieurs années le sport-santé, avec le souci de toucher un plus grand nombre de détenus.

Coachs extérieurs. Le sport en prison est encadré par des moniteurs de sport appartenant à l’administration pénitentiaire, aujourd’hui au nombre de 380. Il s’agit de surveillants ayant suivi une formation spécifique pour obtenir cette habilitation. Il est également fait appel en externe à des éducateurs extérieurs (comme ceux de l’Ufolep) qui interviennent sur des créneaux dédiés, avec pour interlocuteur les moniteurs de sport ou le service pénitentiaire d’insertion de de probation (Spip). La politique sportive de l’administration pénitentiaire est gérée un référent national « sport », dont les orientations sont relayées par des référents régionaux.

Vélo. De prime abord cela peut surprendre – on pense forcément à une possible « échappée » –, mais les détenus en fin de peine peuvent aussi pratiquer le vélo, et pas seulement d’appartement. L’impulsion fut donnée en 2009 par un Tour de France cycliste pénitentiaire en 15 étapes qui mena d’un établissement à l’autre 300 participants : détenus, magistrats et personnels pénitentiaires. « L’expérience n’a pas été renouvelée, mais des établissements se sont dotés de vélos et les moniteurs de sport ont pris contact avec des partenaires locaux. Des projets ponctuels ont alors vu le jour à l’échelle des territoires, comme un Tour de Corse et une Transpyrénéenne », relève Laurent Gras.

Occupation. Le sport en prison a souvent d’abord une fonction occupationnelle : « En cela, il participe à la sécurité des établissements et rend moins difficiles les conditions de travail des surveillants. » Laurent Gras cite à ce propos une anecdote : « Lors d’une semaine de "jeux pénitentiaires" en 2017 à la maison d’arrêt de Nice, pour la première fois aucun incident en détention n’a été recensé. Cette fonction occupationnelle n’est d’ailleurs pas contradictoire avec une démarche de réinsertion : pour préparer sa sortie, mieux vaut être en bonne condition physique et psycho-sociale. »

Réinsertion. Les centres de détention se prêtent toutefois davantage à l’utilisation du sport comme outil de réinsertion. « Un surveillant moniteur de sport ne fait pas le même travail en maison d’arrêt et prison pour peine. La programmation diffère : dans l’une, c’est de l’occupationnel et du coup par coup ; dans l’autre, on peut s’investir à plus long terme dans une discipline », explique Sabry Beldjilali, référent sport de l’administration pénitentiaire en Provence-Alpes-Côte-d’Azur.

Se projeter. Les sports qui nécessitent un entraînement long et un fort investissement sont parfois mis en valeur pour leurs vertus pédagogiques : c’est le cas du documentaire « Vertiges, un pas vers la liberté », diffusé en 2022 sur Canal+ et primé en festival. Il suit trois détenus en fin de peine du centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse (Ain) dans leur projet de gravir le mont Blanc. « Amener le détenu à se projeter dans l’avenir, à se préparer pour une échéance : on n’est pas dans l’idéologie coubertinienne d’une compétition loyale, commente Laurent Gras, mais dans l’idée d’atteindre l’objectif que l’on s’est fixé, tout en effectuant un travail sur soi. » Ce qui, humainement et socialement, n’est pas moins noble.

Ufolep. Des comités Ufolep interviennent de longue date en prison en fonction des contacts noués localement, sans qu’il s’agisse d’une orientation nationale. Toutefois ces interventions se sont développées depuis quelques années, à la demande de l’administration pénitentiaire et parce que le renforcement des équipes départementales permet plus facilement d’animer des créneaux d’activités multisports auprès de détenus, qu’il s’agisse de mineurs, d’adultes ou de femmes. C’est le cas en Ardèche et Drôme, Finistère, Gironde, Ille-et-Vilaine avec le Cercle Paul-Bert, Haute-Marne, Savoie, Deux-Sèvres, Hauts-de-Seine…

 

Philippe Brenot

 

Convention PJJ : ne pas confondre. Depuis une convention signée en 2009, l’Ufolep propose des activités physiques et sportives pour les mineurs suivis par la Prévention judiciaire de la Jeunesse (PJJ). Toutefois, les actions proposées ne concernent pas les personnes en détention. Les interventions d’éducateurs sportifs Ufolep dans les quartiers de mineurs sont donc effectuées dans un autre cadre.


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