X
Accueil  /  Actualités  /  Les vélos de Doisneau

Les vélos de Doisneau

Actu_VuLu_couv_Les_vélos_de_Doisneau_(002).jpg

Robert Doisneau (1912-1994) n’était pas un grand cycliste. En revanche, le vélo s’invite souvent sur ses photos. Question d’époque : sa France est celle des bus de banlieue et des 2 CV et 4 CV de l’après-guerre, mais aussi celle des tandems des premiers congés payés et de « la petite reine des dimanches et des vacances » relève le journaliste Vladimir Vasak, qui souffla l’idée de ce thème aux deux filles de Doisneau, toujours promptes à entretenir la mémoire de leur père.

La première image représente – vers 1936 – leur mère Pierrette, presque trop élégante avec son béret blanc pour pédaler sur cette route en terre qui conduisait peut-être à leur maison de Buthiers, en Seine-et-Marne. Sur la suivante, deux bicyclettes démontées sont installées sur le capot de «La 6 CV des vacances » de 1939, les dernières avant longtemps. Entre-temps, il y aura ce vélo-taxi arc-bouté dans la neige de l’hiver 42 au carrefour de l’Opéra, et l’été suivant ce souriant jardinier qui, arrosoir dans le dos et râteau et binette en équilibre sur le cadre de sa bicyclette, rayonne à l’idée d’améliorer son ordinaire. Et le 8 mai 1945, pour fêter la victoire et la paix, c’est toute une foule qui pédale.

L’élan de l’après-guerre, c’est une fête où défilent des vélos aux roues disproportionnées, des randonnées en bord de Marne et des séances du dimanche à l’Eden d’Athis-Mons. Tiré de La Banlieue de Paris, il y a aussi cette fameuse photo d’un cyclo-cross tracé dans la zone de Gentilly, pas loin du carrefour de la Vache Noire, à Montrouge, où des ouvriers à casquette et béret composent un peloton anarchique. Et c’est aussi le renouveau du Tour de France et des courses au Vél’d’Hiv, où l’on fait encore comme s’il n’y avait jamais eu de rafle. Côté boulot, des livreurs de journaux s’élancent au sortir de l’imprimerie tandis que deux hirondelles à képi patrouillent dans leur cape flottante.

L’abondance revenue, on rencontre encore, à la charnière des années 1960 et 1970 un commis boucher la main au guidon et un apprenti boulanger attentif à ne pas renverser sa cargaison de baguettes. Mais, après un clin d’œil à René Dumont, candidat écologiste à la présidence de la République en 1974, les années 80 ne sont plus que documentaires, avec ces enfants en roue libre sur les dalles des villes nouvelles, échappés d’une commande de la Datar. Des années où le vélo se fait rare, avant de refleurir aujourd’hui dans les rues.

Et si, demain, la photographie humaniste renaissait avec lui ? Philippe Brenot


Les vélos de Doisneau, Vladimir Vasak, Angelina Meslem, Glénat, 184 pages, 35, 95 €.
enveloppe Partager sur : partager sur Twitter partager sur Viadeo partager sur Facebook partager sur LinkedIn partager sur Scoopeo partager sur Digg partager sur Google partager sur Yahoo!

Afficher toute la rubrique