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« Un équipement sportif, oui mais pour quel projet ? »

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Sociologue à l’université de Bordeaux, Marina Honta invite les collectivités à se montrer attentives à la complémentarité et la cohérence de leurs infrastructures sportives, notamment dans le cadre du plan de 5 000 équipements.

Marina Honta, qu’est-ce qu’une ville sportive selon vous ?

C’est une ville qui réussit à organiser les conditions d’un accès effectif et durable à la pratique pour toutes et tous : les publics qui le demandent mais aussi ceux qui ne l’expriment pas, les groupes sociaux invisibles, silencieux, marqués par des formes de renoncement. Si l’on prend l’exemple des équipements en libre accès, je pense au public féminin et à des groupes sociaux notamment issus de classes populaires qui, en raison de la monopolisation de ces espaces par le public masculin et d’usages sociaux du corps différenciés, s’abstiennent de les fréquenter. Ces formes de renoncements sociaux sont toutefois très difficiles à détecter et à travailler car les raisons en sont variées.

Quartiers politique de la Ville, zones de revitalisation rurale et Outre-Mer : les critères d’éligibilité au plan des 5 000 équipements sont considérés par des associations d’élus comme trop restrictifs. Qu’en pensez-vous ?

Je ne suis pas d’accord, même si je comprends les revendications des élus locaux qui réclament « un plan Marshall », tant les besoins sont importants. Ce plan cible la géographie prioritaire, celle où les données font état de carence, de vétusté et de faible diversité des équipements sportifs existants. Nous sommes clairement dans une vision de service public du sport qui a la volonté de traiter la question des inégalités, lesquelles se sont creusées encore davantage avec la crise sanitaire. Je m’interroge en revanche sur l’ingénierie pour répondre à cet appel à projets et à bien d’autres dispositifs : les acteurs locaux sont très inégalement dotés en capacités à monter des dossiers, réaliser des études, justifier tels ou tels besoins… Comment les accompagne-t-on ? Il faudra aussi se demander pourquoi des collectivités éligibles n’y sont pas allées. Comment expliquer le non-recours à ce type de programme qui se veut pourtant aidant et volontariste ? Cela est rarement évalué.

Un nouvel espace de pratique est souvent perçu comme un nouveau service. Mais est-il toujours pensé comme un outil de la politique sportive ?

Un équipement c’est bien, mais pour quel projet ? La réflexion doit être globale et pas seulement portée par le service des sports et l’élu concerné, mais associer les services ayant trait à la santé, l’éducation, l’action sociale, la transition énergétique, et bien sûr l’urbanisme, autre acteur essentiel de cet accès aux pratiques, à travers les pistes cyclables notamment. Sans oublier les habitants, bien sûr ! Mettre en complémentarité et en cohérence les différents types de pratique et les équipements nécessite de la transversalité, de la participation et une co-construction. Mais c’est compliqué et chronophage, alors même qu’il faut répondre à des appels à projets adossés à des calendriers stricts. Cela n’incite pas toujours les collectivités à prendre ce temps de la réflexion pour établir des diagnostics approfondis et partagés. D.P.


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