Le projet de sciences participatives développé par le Muséum national d’histoire naturelle avec l’Ufolep s’adresse à tous les « citoyens sportifs », explique directrice du département Homme et environnement.
Frédérique Chlous, comment est né le projet « Histoires de sports et de nature » ?
Ce programme s’insère dans un projet plus général de sciences participatives, intitulé « Histoires de nature » et débuté en 2021. L’idée était de faire appel aux citoyens pour documenter les changements environnementaux, sur un registre personnel, en complément des travaux scientifiques menés par ailleurs1.
L’objectif est-il de provoquer une prise de conscience des évolutions ou des bouleversements liés au changement climatique ?
En partie. L’un des objectifs est en effet de rendre ces changements plus perceptibles à un large public. Mais le corpus de données, récits et documents ainsi constitué va également permettre aux chercheurs de travailler sur la relation à l’environnement et les représentations à l’égard des changements qui le menacent. Nous avons profité de la caisse de résonnance d’une année olympique pour lancer ce programme en sollicitant celles et ceux qui ont une relation à la nature à travers leur pratique sportive.
Pourquoi s’être associé à l’Ufolep ?
Parce que c’est une fédération sportive ancrée dans les territoires et que l’intime, le familier ont toute leur place dans ses pratiques. Outre son maillage territorial, nous avons sollicité l’Ufolep pour sa dimension sport-loisir, la nature de ses actions, la diversité de ses publics et ses valeurs humanistes.
Comment participer au projet ?
En déposant ses contributions sur la plateforme numérique dédiée. Après avoir ouvert un compte personnel, chacun peut poster un document numérique – photo de paysage ou d’objet, coupure de journal… – à partir duquel il est invité à développer un récit qui peut tenir en quelques lignes ou en plusieurs paragraphes. Par exemple : « Voici l’endroit où j’avais l’habitude de courir, naviguer, pagayer, marcher sur glacier lors d’une course en montagne, mais depuis telle année l’environnement a changé et ce n’est plus possible… » Ou, au contraire, de façon plus positive : « Depuis l’arrêt de toute activité industrielle, ce coin est devenu une réserve naturelle où l’on rencontre de plus en plus d’oiseaux, en particulier telle espèce que j’aime beaucoup… » Il s’agit d’un récit personnel à partir d’un document situé dans le temps et l’espace.
Les gens éprouvent parfois des difficultés à comprendre que ces « petits riens » ont de l’intérêt pour d’autres, a fortiori des chercheurs…
Pour nous, tout est intéressant, qu’il s’agisse d’une photo privée récente ou d’une archives retraçant un évènement lointain. Cet intérêt réside dans le lien entre le document et le discours, non pas général mais de l’ordre du journal intime.
Un peu comme un post Instagram…
Oui, la dimension participative et scientifique en plus !
Ce programme a-t-il vocation à perdurer ?
Il se poursuivra au-delà de 2024. C’est une collection, au même titre que les collections naturalistes qu’abrite le Muséum d’histoire naturelle du Jardin des plantes.
J’insiste, mais très concrètement, à qui cela va-t-il vraiment servir ?
Aux chercheurs de notre conseil scientifiques qui se questionnent sur ce que symbolise le mieux, pour les individus, les changements environnementaux : quels sentiments et émotions éprouvent-ils, et en quels termes les expriment-ils ? Or aujourd’hui les activités sportives, en particulier celles de plein air, nous mettent en relation avec l’environnement. J’ai dans mon cercle de connaissances beaucoup de personnes qui pratiquent le trail, et pour elles il ne s’agit pas seulement de performance. C’est une façon d’être au monde, au cœur de paysages et d’une faune, avec les différentes émotions qui y sont liées et que nous invitons chacun à partager. Propos recueillis par Philippe Brenot
(1) Cette mission est financée par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.
« Le volley a fait son entrée à l’amicale laïque de Guilherand-Granges en 1984. Jeune adulte, j’ai pratiqué une dizaine d’années, avant que mes responsabilités familiales ne m’en éloignent », se souvient Jeff Seince, 60 ans, joueur, entraîneur et responsable d’une section en plein renouveau.
Il y a une dizaine d’années, quand Jeff a souhaité retrouver le chemin des parquets, la section volley s’était depuis peu muée en club autonome, affilié à la FFVB afin d’évoluer à un plus haut niveau, tout en conservant des équipes loisir engagées en Ufolep. Jusqu’à ce qu’elles soient sacrifiées il y a trois ans sur l’autel du tout-compétition...
Les pratiquants éconduits ont alors retrouvé le giron de l’amicale. Ils y ont gagné un nouveau maillot conçu par Jeff lui-même, fort d’une expérience professionnelle dans le domaine de la communication : un oiseau d’or prenant son envol sur fond bleu, en écho aux couleurs de la ville et au nom du nouveau club : « Le Phénix », celui qui renaît de ses cendres ; tout un symbole.
Dix licenciés la première année, 22 aujourd’hui, dont un tiers de femmes, avec un benjamin affichant 22 ans et le doyen 65 : de quoi engager deux équipes dans les poules de niveau 5 et 7 du championnat mixte commun aux comités de la Drôme et de l’Ardèche. Les 16 matches aller-retour sont complétés par quelques tournois d’avant ou d’après-saison, disputés en soirée, à quatre équipes et en format 4x4. Sinon c’est du volley classique à six joueurs et en cinq sets.
Le Phénix a récupéré un créneau du lundi soir dans un gymnase divisé en trois tiers : le sien et ceux respectivement occupés par un club corpo Ufolep et l’équipe féminine de leur ex-club. C’est là qu’il accueille ses visiteurs. « Un terrain pour 22 joueurs, il faut parfois s’organiser en variant les exercices. Mais nous sommes rarement au complet et, au besoin, on mixte avec l’autre club Ufolep, où ils sont moins nombreux. »
Avec Jeff, d’autant plus investi que sa nouvelle activité de réparateur en vélo-cargo lui laisse une certaine latitude côté emploi du temps, le volley Ufolep a repris son envol à Guilherand-Granges. Et pour lui rendre tout son lustre, l’entraîneur-joueur-responsable aimerait renouer avec la « Nuit du volley » que la section organisait autrefois. Une vingtaine d’équipes smashant jusqu’à deux ou trois heures du matin, cela ferait aussi du Phénix un bel oiseau de nuit. Ph.B.
Le comité a brisé la spirale du déclin en renforçant son équipe pour investir les activités physiques adaptées et relancer le développement associatif.
En 2013, l’Ufolep Ardèche réunissait 47 associations et 1500 licenciés. Vieillissement du réseau, évaporation des cyclistes et motards et crise du Covid : en 2022, le comité n’en fédérait plus que 600, répartis dans 21 associations. Un déclin irréversible ? Non, puisque la saison passée ils étaient 783.
Une équipe étoffée
Ce regain traduit la dynamique engagée à la rentrée 2019 avec l’embauche d’une agente de développement, investie de missions santé, notamment dans le cadre du projet régional Atout-Prévention-Bien bouger bien manger, commun aux comités d’Auvergne-Rhône-Alpes. « Nous effectuons aussi des prestations d’activités physiques adaptées (Apa) au domicile de personnes âgées, et nous travaillons avec l’association Préo, dédiée à la prévention de l’obésité des jeunes. Nous animons également des Apa en famille sur le secteur rural de Vernoux-en-Vivarais, et des séances individuelles à Privas, la préfecture, dans l’idée que ces jeunes puissent ensuite intégrer une école de sport Ufolep, explique Marielle San José, déléguée Ufolep et Usep. Et comme notre première éducatrice sportive, Chloé, mobilisée aussi par les formations aux premiers secours, n’arrivait plus à répondre aux sollicitations, nous avons recruté Margot, également diplômée Apa. Enfin, à long terme, l’un de nos souhaits serait de pouvoir créer une maison sport santé Ufo3S. »
Développement associatif
Ces prestations ne sont toutefois pas une fin en soi. « L’objectif est bien que les deux éducatrices travaillent parallèlement au développement associatif en profitant de leur présence sur le terrain », insiste Antoine Cochet, successeur il y a trois ans à Gilbert Auzias à la présidence de l’Ufolep. L’une des illustrations est la convention signée avec France Alzheimer dans le but que les interventions des éducatrices sportives puisent déboucher sur l’intégration de bénéficiaires dans les associations Ufolep locales.
Il s’agit d’aller désormais au-devant du réseau. « Le comité s’est maintenu grâce à la fidélité de ses associations historiques, mais que leur apportions-nous ? », interroge Antoine Cochet. Le comité directeur se délocalise régulièrement hors de Privas, au siège d’une association, et ses travaux se prolongent par un temps d’échange avec elle : une façon de se montrer à l’écoute et de repérer les dirigeants bénévoles qui permettront de renouveler l’instance départementale.
« Nous nous rapprochons des offices municipaux des sports (OMS) afin de toucher des associations susceptibles d’être intéressées par l’approche loisir et multisport de l’Ufolep » ajoute Antoine Cochet, qui préside par ailleurs l’amicale laïque de Guilherand-Granges, commune de 11 000 habitants seulement séparée de l’agglomération de Valence par le Rhône1. L’amicale possède notamment une section volley renaissante et une section tennis de table passée en quelques années d’une dizaine de licenciés à près de 70 adhérents.
Gain de notoriété
Avec le concours de celle-ci et l’appui de la municipalité, au printemps 2022 et à l’été 2023 le comité a successivement accueilli le National de tennis de table B (réservé aux licenciés Ufolep) puis une étape du Playa Tour, expérience qu’il renouvelle cette année afin de replacer l’Ufolep dans le paysage sportif. « Nous conservons un déficit de notoriété et nous devons renforcer notre image auprès du Conseil départemental, des grosses communes et des autres acteurs institutionnels. Cela prend un peu de temps, mais cela change. » Une façon de signifier que le feuilleton de la renaissance associative ne fait que débuter : « Ardéchois cœur fidèle », et à présent tourné aussi vers l’avenir.
Philippe Brenot
(1) Après avoir été animateur Bafa, directeur de centre d’accueil, responsable des séjours éducatifs puis secrétaire général de la Ligue de l’enseignement de l’Ardèche, Antoine Cochet est à 39 ans directeur général délégué de l’Union régionale des fédérations des œuvres laïques (Urfol) Auvergne-Rhône-Alpes.
Un noyau d’amicales laïques
Les amicales laïques et autres foyers de jeunes représentent la moitié des 21 associations Ufolep et la grande majorité des licenciés. Avec ses sections ou activités de la forme, danses urbaines, UfoBaby, tennis de table, tir à l’arc, gymnastique artistique, basket-ball et arts martiaux, le FJEP Cruas pesait même à lui seul 163 licenciés sur les 783 que fédérait l’Ufolep Ardèche en 2022-2023. Le comité se caractérise également avec sa grande proximité avec son voisin de la Drôme, et des championnats communs en tennis de table (géré par l’Ardèche) et volley-ball (géré par la Drôme). Désormais les deux comités se partagent aussi les interventions hebdomadaires auprès des détenus de la centrale de Privas, que faute de ressources humaines en Ardèche les éducateurs et éducatrices de la Drôme étaient auparavant seuls à assurer.
Parmi les autres activités, la gymnastique bénéficie elle aussi d’une dynamique régionale et parmi les associations on peut citer aussi l’équipe de foot à 7 de Coucouron, engagée dans le championnat vétéran de l’Ufolep Haute-Loire, les randonneurs pédestres d’Annonnay, les badistes de Privas ou le club de trial 4x4 de Saint-Martin-de-Valamas.
La géographie de l’Ardèche est parfois un frein au développement associatif. Privas, où le comité a son siège, est la plus petite ville préfecture de France avec 8300 habitants, loin derrière Annonay (au nord, regardant vers la Loire) et Aubenas (au sud). Le territoire se divise entre, d’un côté, les petites communes rurales du plateau ardéchois et, de l’autre, celles implantées le long du Rhône (Arras, Guilherand-Granges…), qui regardent volontiers vers Valence, préfecture de la Drôme et principal bassin d’emploi. Par ailleurs, les associations ne peuvent compter sur le vivier des étudiants, qui doivent s’expatrier à Valence, Saint-Étienne, Lyon ou Aix-Marseille afin de poursuivre leurs études.
Après avoir retrouvé ses effectifs d’avant-Covid, le comité veut développer l’offre loisir parmi les activités traditionnelles et poursuivre son ouverture sport société.
Effectifs. Avec 11 795 licences délivrées et 298 associations fédérées, le comité Ufolep Nord a presque retrouvé ses effectifs d’avant Covid et nous espérons dépasser d’ici cette été la barre symbolique des 12 000 grâce aux activités printanières, cyclisme et sport auto et moto.
Activités. Nos trois principales activités sont la gymnastique, le cyclosport et le volley-ball. Parmi celles plus récemment apparues, la plus dynamique est le parkour, dans le sillage de l’association Parkour 59, affiliée à l’Ufolep Nord depuis 2011, deux ans après sa création. Nous venons d’organiser la première formation du nouveau brevet fédéral d’animateur parkour Ufolep avec cette association à la fibre très sociale et réfléchissons à présent à la forme que pourrait prendre une offre compétitive loisir, dans l’esprit Ufolep. Par ailleurs, le dispositif Pass’Sport, très utilisé à l’Ufolep Nord, nous a ramené de nouvelles activités, comme le cheerleading. Les associations non affiliées à une fédération agréée se tournent en effet vers notre comité afin de pouvoir accepter ces chèques : à nous ensuite de faire aussi reposer leur affiliation sur des valeurs partagées.
Associations. La grande majorité de nos associations sont unisports et compétitives. Elles se consacrent à l’une des trois grandes activités citées plus haut, sont plutôt urbaines et souvent anciennes. Certains clubs de volley ou de gymnastique ont allègement passé le demi-siècle ! Grâce à ce tissu associatif historique, l’Ufolep est présente dans 185 des 648 communes du département. Ce modèle traditionnel reposant essentiellement sur le bénévolat s’essouffle toutefois depuis la pandémie. Enfin, depuis quelques années nous voyons arriver des associations sociosportives : elles nous rejoignent pour nos valeurs et l’accompagnement que nous sommes en mesure de leur apporter pour développer leur projet spécifique.
Comité. L’Ufolep Nord s’appuie sur une équipe de 8 salariés, un comité départemental de 17 membres et 9 commissions sportives départementales, tandis que trois activités (GRS, auto et moto) sont régionalisées. Cela représente un réseau de 130 dirigeants bénévoles qui contribuent notamment aux formations fédérales et sont présents sur les évènements organisés chaque week-end. Ce réseau de bénévole est essentiel pour gérer autant de disciplines, sachant que les missions de 5 des 8 salariés portant sur le secteur sport éducation et que trois autres animent des activités physiques adaptées (Apa), en particulier sur les deux sites de la maison sport santé Ufolep (Ufo3S) inaugurée en 2021, à Armentières et Lille.
Perspectives. L’Ufo3S – labélisée il y a deux ans "maison sport santé" par le ministère – a permis de recruter 2 personnes à temps plein et de renforcer notre orientation sport-santé et Apa. Côté sport-éducation, la priorité est de développer l’offre loisir parmi les activités compétitives, par exemple à travers le Kid bike pour les activités cyclistes ou le dispositif UfoBaby concernant la gymnastique et les activités d’expression.
Thibaut Dourlen, délégué Ufolep du Nord.
Le Nord accueille au Grand Sud
L’assemblée générale de Lille se déroulera au Grand Sud, salle multiculturelle inaugurée il y a dix ans dans un quartier politique de la Ville, et à laquelle l’Ufolep Nord a eu accès en tant qu’association Lilloise. « Cela fait bien longtemps que le Nord n’avait pas accueilli l’AG nationale, et notre candidature a mûri parallèlement au renforcement de notre équipe salariée et du développement de nouveaux projets, explique Thibaut Dourlen. L’organiser aujourd’hui prend son sens, en permettant de donner un coup de projecteur sur nos actions. Et quoi de mieux qu’une année olympique et de grande cause nationale pour cela ? »
Au cœur d’enjeux liés à Paris 2024 et à l’avenir de l’Ufolep, l’AG de Lille (Nord) étrennera le vote des associations pour l’élection des représentants nationaux.
Lille 2024 sera une date mémorable : il s’agira en effet de la première assemblée générale où l’Ufolep appliquera pour l’élection de ses représentant nationaux la Loi sur la démocratisation du sport en France. Promulguée en mars 2022, celle-ci est effective depuis le 1er janvier.
7 200 associations. Jusqu’à présent, ces représentants et représentantes nationaux (les 30 membres du comité directeur en ce qui concerne l’Ufolep) étaient élus tous les quatre ans en assemblée générale par les représentants des comités départementaux. Les comités disposaient pour cela d’un nombre de « mandats » proportionnel à l’ensemble des licenciés et licenciées qu’ils fédèrent. Si ce principe demeure, les représentants des comités départementaux ne représentent plus que la moitié du collège électoral : désormais, l’autre moitié est constituée par les représentants des associations affiliées. Comme il est difficile d’imaginer de réunir à Lille les mandatés des 7 200 associations Ufolep, ce vote sera accessible en distanciel, selon une procédure digitalisée, comme le prévoit la loi.
Trente nouveaux élus. Les associations participeront donc à la désignation du nouveau comité directeur : l’occasion de monter que ce qui fait en partie la force de l’Ufolep, c’est la mobilisation et l’engagement de ses bénévoles et dirigeants. Les 30 personnes qui seront désignées auront alors la responsabilité de piloter et d’animer la fédération durant quatre ans, cycle calqué sur le rythme olympique. Épaulée par les comités départementaux et régionaux et par les commissions nationales sportives ou statutaires, cette nouvelle équipe devra anticiper, réagir et tenir la barre de l’Ufolep.
Projet sportif fédéral. Durant l’AG, un important temps de travail sera consacré à notre Projet sportif fédéral (PSF) à ce moment charnière entre les projets 2020-2024 et 2024-2028. Le comité directeur actuel a souhaité effectuer ce bilan avant la fin de son mandat, afin de donner aux nouveaux élus tous les éléments utiles pour se projeter aussitôt vers l’élaboration du suivant. Afin de favoriser la participation et la co-construction, une enquête nationale a été diffusée dès début janvier et ses retours feront à Lille l’objet d’une synthèse : des propositions à partir desquelles le nouveau comité directeur pourra aussi commencer à travailler sans délai sur le nouveau PSF, dans le but qu’il soit prêt pour le début de la saison sportive 2024-2025.
Jeux olympiques. Fédération labélisée Terre de Jeux, l’Ufolep placera également son AG sous le signe des Jeux olympiques et paralympiques et des évènements qui y sont associés. À quelques semaines de ces grands rendez-vous, les questions seront sans doute nombreuses sur les dispositifs dans lesquels l’Ufolep est impliquée : billetterie destinée aux dirigeants de l’Ufolep, présence au club France installé à La Villette pendant les Jeux, projet Érasmus mené avec l’Insep, implication dans la Grande collecte des Archives nationales, portage de la plateforme Histoires de nature en lien avec le Muséum d’histoire naturelle, etc.
Villages. Un large temps d’échanges sera évidemment consacré au dispositif « Le sport au cœur des villages », piloté par l’Ufolep dans le cadre de la Grande Cause nationale dédiée cette année à l’activité physique pour tous : soit 500 événements multisports, intergénérationnels à programmer de mai à octobre pour animer autant de villages de moins de 1000 habitants avec une priorité santé-bien-être et en lien étroit avec les élu.es et associations locales,
Label FIER. Lors de l’AG, l’Ufolep recevra officiellement le label de la Fondation inclusion pour un environnement respectueux (FIER) portant sur la lutte contre les discriminations liées au genre. Ce sera une façon de rappeler cette priorité première de l’Ufolep : « l’égalité », réaffirmée aujourd’hui à travers une grande campagne de communication. Par ailleurs, après avoir apporté son expertise et son appui logistique aux Gay Games Paris 2018, l’Ufolep sera présente à la Maison des fiertés ouverte durant les Jeux olympiques et paralympiques de Paris.
Partage. Enfin, plus traditionnellement, ce grand rassemblement de la famille Ufolep sera l’occasion de distinguer et remercier les bénévoles et salarié.es des comités pour leur investissement – et aussi les élus nationaux qui ont fait le choix de ne pas se représenter –, d’inviter nos partenaires et de faire rayonner notre fédération auprès des acteurs locaux, départementaux et régionaux, dans ce bel écrin du Grand Sud.
Arnaud Jean, président de l’Ufolep
En prenant une licence auprès des Esox de Basse-Goulaine, près de Nantes, Sarah, 30 ans, cheffe de projet en cybersécurité, a brisé les codes. Mais elle conserve la frustration de n’avoir pu participer aux matchs.
Muscu. « J’ai toujours fait beaucoup de sport : douze ans de judo, dix de natation... J’ai même commencé une fac de sport, et j’ai longtemps été à 100 % dans la masculinité. Mais quand j’ai débuté ma transition en 2016, j’ai interrompu ma pratique, avant de me tourner vers la musculation en salle. J’en fais 1 h 30 tous les jours et c’est très important pour moi. Et donc, l’an passé, j’ai essayé le football américain par l’intermédiaire du frère de ma copine, lui-même pratiquant. Il m’a dit qu’au regard de mon gabarit et de mon goût d’en découdre, c’était un sport qui me conviendrait bien. Il m’a mis en contact avec Mathieu, le président des Esox, pour qui cela ne posait aucun problème d’intégrer une femme. C’était la première fois que je pratiquais un sport collectif. »
Frustrant. « Vous m’apprenez qu’en Ufolep la pratique peut être mixte. Ce n’était pas le cas au club, par manque d’information peut-être (1). Je participais à tous les entraînements mais je n’ai joué qu’un seul match, en région parisienne, sous la bannière de la FFFA, avec une équipe réunissant des filles de clubs du Nord et du Grand Ouest. Mais l’organisation était défaillante. Alors, même si j’ai adoré pratiquer ce sport, je n’ai pas repris de licence, par manque de temps et parce qu’il est frustrant de ne disputer qu’une seule rencontre dans l’année, avec des coéquipières que je ne connaissais pas, alors que le club était engagé dans les deux championnats FFFA et Ufolep. C’est dommage, car j’ai été très bien accueillie aux Esox, où d’ailleurs il n’est pas sûr que tout le monde savait que j’étais une femme trans. »
(1) La mixité a toujours été possible dans le championnat Ufolep de foot US, comme cela avait été évoqué à la suite d'une question du président des Esox. Cela ne s'était toutefois pas traduit dans les faits, sans doute en l'absence de retranscription précise dans le règlement. Il convient toutefois de prendre en compte le niveau de la personne afin de limiter les écarts de niveau et prévenir les blessures.
Baptiste, étudiant, est licencié de badminton de longue date à l’Ufolep Finistère, mais seulement depuis cette année en catégorie masculine.
Amicale. « Je joue au badminton depuis l’âge de 9 ans à l’amicale laïque de Coataudon, près de Brest. J’en ai aujourd’hui 22. J’ai commencé ma transition fin 2022, avec prise de testostérone, et je souhaite encore effectuer une mammectomie. Administrativement, je m’appelle désormais Baptiste, même si à l’état-civil je reste identifié au genre féminin car il faut passer pour cela devant un tribunal. Ma démarche a été comprise par ma famille et au sein du club, où pratiquent aussi ma mère et mon jumeau. Nous avons grandi ensemble depuis notre naissance et il a forcément été très troublé, mais a toujours été là pour m’aider. »
Adversité. « En cours d’EPS, j’éprouvais parfois une gêne à l’égard de mon corps, sans penser alors à changer de genre. Avec le club, j’ai participé à des tournois féminins et je disputais jusqu’en 2020, avant le Covid, un championnat départemental opposant des équipes mixtes, avec pour chaque match des simples hommes, des simples femmes et des double mixtes. Mais ensuite, par manque de joueuses nous avons dû y renoncer, et les entraînements ont alors perdu pour moi beaucoup de leur intérêt, jusqu’à ce que je puisse reprendre cette année les matchs en catégorie masculine. »
Puissance. « Mon apparence ne laisse pas deviner que j’étais auparavant une femme et, sportivement, c’est conforme à ce que j’attendais. Avec la testostérone, j’ai gagné en masse musculaire et en puissance : je tape plus fort qu’avant. Mentalement, au début c’était plus perturbant, envers mes coéquipiers et concernant le regard que je portais moi-même sur mon corps. J’ai perdu du poids, je me suis affiné aux hanches et aux cuisses, et il m’a fallu m’habituer à ce corps plus fin et musclé. Outre la puissance, cela change la façon de jouer : les appuis sont différents et la façon de courir change aussi. »
Réconfort. « Le sport aide à évacuer problèmes et pensées négatives, y compris celles liés au regard des autres. Le cadre compétitif permet également d’affirmer plus encore qui on est, surtout en tant qu’homme. Il se trouve aussi que je suis coach pour les jeunes et que, lorsque j’ai annoncé ma transidentité, l’un d’eux s’est ouvert à moi. Il a aujourd’hui 17 ans et a fait le même chemin du féminin au masculin, mais sa nouvelle identité est très mal acceptée par sa famille. Le club, où nous prônons l’acceptation de soi, est pour lui un vrai soutien. »
À l’issue de sa transition, Hélène, 50 ans, cheffe d’entreprise francilienne et présidente de club, a poursuivi l’an passé sa pratique cycliste compétitive en Ufolep sous sa nouvelle identité de genre.
Hélène1, quelle était votre pratique sportive sous votre précédente identité masculine ?
Multiple ! Dès l’enfance, j’ai pratiqué beaucoup de sports : gymnastique, sports alpins, basket, tennis et tennis de table, golf, voile, VTT, athlétisme et courses sur route, boxe… Toujours dans un esprit loisir mais en donnant le meilleur de moi-même, comme dans la vie. J’ai aussi effectué mon service militaire dans les chasseurs alpins, au sein d’une unité d’élite exigeant un excellent niveau physique et sportif.
Et le cyclisme ?
Ce goût est venu plus tardivement, il y a une douzaine d’années. Je voulais préparer un marathon en évitant les chocs pour préserver mon dos lors de séances de fractionnés. Je me suis donc achetée2 un vélo, qui ensuite est resté un an au garage, avant de saisir l’occasion de participer à une cyclosportive. Et j’ai adoré l’expérience : les sensations d’aspiration, de vitesse, la coordination au sein du peloton... Je me suis inscrit en club et, après un an de sorties en groupe, j’ai participé à mes premières courses.
Avez-vous conservé une pratique sportive pendant votre transition, entamée il y a trois ans ?
Sachant que mes capacités physiques allaient chuter en raison de ma thérapie hormonale – bloqueurs de production de testostérone durant la période où je n’étais pas opérée et prise d’œstrogènes, hormone secrétée par les ovaires – j’avais anticipé en évitant de « marquer des points » l’année précédente, afin de descendre de catégorie. Je suis passée du niveau régional au niveau départemental de la Fédération française de cyclisme, qui correspond à la première catégorie Ufolep. Mais, après 15 minutes j’étais quand même « larguée » par le peloton. Et une fois lâchée, la course est finie. J’ai vécu une saison compliquée.
Mais vous avez persisté en 2022-2023…
J’ai obtenu de descendre d’une catégorie supplémentaire en FFC et, par dérogation, de deux catégories en Ufolep. Surtout, à la différence de la FFC, l’Ufolep m’a accordé le changement de licence correspondant à mon nouvel état-civil, officialisé après jugement. Y figurent le prénom et le sexe qui sont désormais les miens. Cependant, même rétrogradée en 3e catégorie, je n’ai pas pu tenir le rythme : je manquais significativement de force… Or je ne fais pas du vélo pour la promenade : je m’entraîne pour l’adrénaline de la course en peloton. Alors, faire de longs trajets en voiture pour tenir à peine dix minutes sur des parcours sans difficultés, c’est décourageant ! Je me donne encore une année, pour voir. Sinon j’arrêterai, et je passerai aussi la main à la tête de mon club.
Vous avez en effet créé l’association sportive que vous présidez…
J’appartenais à un gros club de 150 licenciés, et j’ai souhaité en créer un nouveau, où chacun puisse mieux se connaître, en sollicitant des amis. Nous sommes trente licenciés, jusqu’à ce que j’y devienne la première femme ! Et personne n’est parti lorsque, lors de l’AG annuelle, j’ai fait part de ma transition en m’y rendant telle que je me présente aujourd’hui : les uns m’ont apporté leur soutien et les autres n’ont marqué aucune réprobation.
Pourquoi s’engager dans cette démarche à 45 ans passés ?
J’y pensais depuis mon adolescence, sans réussir à identifier la source de mon déséquilibre. Il n’y avait pas internet à l’époque, le transsexualisme était considéré comme une maladie psychiatrique et l’on ne parlait pas de transidentité. Puis, avec les années, j’ai cheminé. Mais en créant le club, je n’envisageais pas de passer à l’acte un an plus tard et d’assumer ce choix sur le plan mental, social, administratif et physique.
Quelle a été la réaction de vos proches ?
Bienveillante, avec beaucoup de témoignages de soutien dans mon cercle amical, sportif ou professionnel. Moi qui craignais beaucoup ces réactions, je me suis rendu compte que la première personne qui me discriminait, c’était moi-même. Sur le plan intime, je suis séparé de ma deuxième épouse et désormais en couple avec une femme qui a une préférence pour vivre avec une autre femme, et qui participe beaucoup à mon équilibre. Mes enfants – deux grands fils et une fille de 9 ans – se sont adaptés à la situation, même si cela a été plus long et difficile pour les deux aînés. Il faut souvent du temps pour les familles, il convient de l’accepter avec tolérance, d’autant plus que j’ai mis moi-même trente ans à m’accepter.
Êtes-vous anonyme dans le peloton ?
Plus ou moins. Il faut savoir qu’en Ufolep, à part les championnats – départementaux, régionaux ou nationaux –, les courses sont mixtes mais le peloton essentiellement masculin : sur 60 ou 70 concurrents, il y a rarement plus de deux ou trois féminines. Ayant écumé les pelotons et fait l’objet de quelques articles de presse pour mes résultats passés, il arrive que des personnes m’ayant connu à cette époque me reconnaissent. Parfois, je suis aussi allée me présenter. D’autres connaissent mon parcours de transition et m’identifient. Mais je n’aspire pas à être identifiée comme une femme transgenre. Je souhaite au contraire être la plus invisible possible, au sens de la normalité. Donc plus je suis anonyme, mieux je me sens.
Souhaiteriez-vous participer à un National Ufolep ?
Oui, car mon vœu le plus cher est de participer à des courses 100 % féminines. Aujourd’hui, dans un peloton de garçons je suis aussi mal à l’aise que si on me demandait désormais d’utiliser des toilettes masculines. Donc oui, j’aimerais participer à des courses au sein de la communauté des femmes, mais sans leur porter une concurrence susceptible d’inciter l’Ufolep à faire marche arrière après m’avoir accordé une licence féminine. Femme transgenre, je suis ravie d’être autorisée à concourir, mais je ne me sens pas autorisée à gagner.
Vous sentez-vous concernée par les polémiques concernant la participation des athlètes transgenres aux compétitions ?
Oui, cela m’interpelle. À mes yeux, le préalable est la défense du sport féminin. C’est ce que je revendique, et mes propres souhaits de femme transgenre passent après. Une fois cela posé, je suis dépitée par le bannissement des compétitions des femmes transgenres (au sens de personnes ayant effectué une transition, à distinguer de celles se considérant genderfluid ou non binaire et n’étant pas sous thérapie), sans que leur avantage physique supposé soit prouvé. En cyclisme, l’UCI a décidé en juillet 2023 de les écarter de toutes ses compétitions, alors même qu’elle avait édicté un an plus tôt une législation exigeant un taux de testostérone extrêmement bas (moins de 2,5 nanomoles par litre de sang), et justifié sur deux ans. Après la course remportée en mars par l’Américaine Austin Killips, l’UCI a argué d’un doute sur un possible avantage physiologique.
Pour vous, c’est discriminant…
Je sais que pour le grand public, toutes les femmes transgenres sont considérées comme ayant conservé les capacités d’un homme. Or je suis bien placée pour savoir que non : la puissance de 300 watts que je développais sur 1 h 30, je la tiens à présent sur 10 minutes à peine, et je suis incapable d’enchaîner plusieurs sprints. Ma masse graisseuse a augmenté de 15% et, après avoir été sous thérapie hormonale, depuis ma vaginoplastie je ne produits plus de testostérone.
J’ajoute que le règlement de l’UCI est destiné aux athlètes concourant à un niveau international. Les fédérations nationales peuvent retenir des critères moins stricts, mais la FFC a décidé de s’aligner sur le règlement de l’UCI, que l’on soit une professionnelle ou une cycliste engagée dans la catégorie la plus faible des courses loisirs. Je suis donc reconnaissante vis-à-vis de l’Ufolep d’avoir accepté ma demande de changement de licence, et d’avoir allégé ma souffrance de devoir conserver une licence avec mon ancien prénom et mon ancien genre, qui n’existent plus. Propos recueillis par Ph.B.
(1) Le prénom a été modifié.
(2) À la demande d’Hélène, l’accord féminin s’applique ici pour l’ensemble de l’entretien.
« Aujourd’hui, je me comporte différemment à vélo »
« Moi qui avais la réputation de posséder un pilotage offensif, depuis ma transition j’éprouve une peur nouvelle quand j’engage un virage. Auparavant, c’était plus fluide, je ne me posais pas de questions, j’engageais. J’y vois le signe flagrant que ma transition est aussi psychologique : je ne roule plus comme avant, et cela creuse davantage encore l’écart avec les hommes. En revanche, dans le peloton cycliste les femmes sont d’une efficacité redoutable et extrêmement concentrées : elles produisent moins d’à-coups nerveux et agressifs, leur prise de risque est moindre. Je les trouve aussi particulièrement élégantes dans l’effort. »
« Créer une catégorie transgenre est une aberration »
« La proposition de l’UCI de créer une troisième catégorie, transgenre, est pour moi une aberration ! On intègre qui ? À la fois des personnes binaires et non binaires, sous thérapie hormonale ou non, opérées ou pas, qui se sentent homme ou femme, ni homme ni femme… Cette catégorie fourre-tout n’aurait aucun sens et concernerait un nombre de personnes ridiculement réduit. Le pire, c’est que ce nouveau règlement dit accepter les personnes transgenres n’ayant pas traversé leur puberté. Or on sait avec le recul que cela peut s’avérer une catastrophe médicale d’engager des mineurs dans un parcours hormonal – chirurgical on n’en parle pas, c’est interdit. La plupart des pays pionniers ont fait marche arrière. C’est là une monstruosité éthique, car il est très dangereux de répondre trop vite au désir d’un enfant ou d’un adolescent à la recherche d’une expression de genre ou de sexualité. C’est aussi une manière particulièrement hypocrite de s’afficher inclusif, alors qu’en réalité c’est tout le contraire ! »
Le sigle LGBT s’est étoffé au fil des ans afin de rendre compte des différentes identités sexuelles :
L comme lesbienne : une femme qui a des relations sexuelles avec une femme.
G comme gay : un homme qui a des relations sexuelles avec un homme.
B comme bi : une personne qui a des relations sexuelles avec un homme ou avec une femme.
T comme trans : une personne née homme ou née femme et qui ne se sent pas appartenir à ce genre. « Transsexuel-le » est parfois utilisé pour désigner plus spécifiquement les personnes opérées, et « trangenres » parfois pour les autres. Aussi le terme générique « trans » permet-il d'inclure la multiplicité des parcours et des identités.
Q comme queer : une personne se dit queer quand elle ne se reconnaît pas dans la sexualité hétérosexuelle, ou ne se sent pas appartenir à un genre défini.
I comme intersexe : les personnes intersexes ne sont nées ni homme ni femme (en France, 200 enfants seraient concernés sur 800 000 naissances annuelles).
A comme asexuel : ces personnes ne ressentent pas le besoin de s'engager dans des relations sexuelles, tout en pouvant entretenir des relations amoureuses.
+ comme : « et tous les autres ». (avec Libération)
Marie-Laëtitia, 58 ans, pratique la moto-trial dans un club Ufolep de l’Aude. Elle dit piloter avec la même passion, mais différemment, depuis sa transition.
Différente. « Je me sais différente depuis l’âge de 6-7 ans, j’en ai cinquante de plus aujourd’hui. Quand en 2017 j’ai fait part à mon épouse de ma volonté d’entamer une transition, elle m’a demandé d’attendre un an. Puis, pendant celle-ci, j’ai mis ma pratique sportive de côté, car les gens avaient un peu de mal à comprendre. Aujourd’hui, je suis complètement revenue dans le sport, à mon petit niveau. »
Technicité. « J’ai toujours rejeté les sports machos, foot ou rugby, et les disciplines collectives en général, car j’étais renfermé1 sur mon mal-être. Vers 25-30 ans, je me suis tourné vers la moto-trial, dont j’apprécie la technicité, alors que je n’étais pas du tout attiré par la route, le cross ou l’enduro. Adolescent, j’étais motorisé – quasi une obligation quand on habitait la banlieue de Toulouse – et je suis venu au trial par un forum sur internet qui m’a aussi fait connaître mon club. J’ai abordé cette pratique comme un loisir plus qu’une compétition : "Qu’on arrive premier ou dernier, on a quand même sa bouteille de vin", comme on dit chez nous. C’était le plaisir de rencontrer des gens passionnés, de voir de beaux engins, et de se vider la tête l’espace d’une journée. Bien sûr, réaliser un carton avec des zéros – sans faute technique – ajoute du piment, mais ce n’est pas le plus important. Je suis licenciée Ufolep, dans un club à simple affiliation, et je roule principalement en side-car : une catégorie assez marginale où, comme ailleurs, la pratique est mixte, même si les femmes sont rares. »
Élément déclencheur. « J’ai toujours vu dans le suicide une certaine lâcheté envers ceux que l’on aime et qui vous aiment. Quand, submergé par mon mal-être, je me suis senti près de passer à l’acte, je m’en suis ouvert à ma femme, qui m’a conseillé d’aller consulter une psychologue. Il y a ensuite eu la phase d’acceptation, puis mon coming out et ses conséquences. Sans ce profond mal-être qui me menait au suicide, je n’aurais probablement pas passé le cap. »
Acceptation. « Parmi mes proches, mon épouse a compris mon choix, même si c’est très difficile pour elle. Mon garçon n’a eu aucun problème, mais ma fille m’a tourné le dos : je ne connais pas mes petits-enfants. Nous avons aussi perdu presque tous nos amis, ce sont des dommages collatéraux assez douloureux. Au sein du club, cela a été bien accepté, même si certains parlent certainement dans mon dos… La transition du féminin au masculin est, je crois, mieux acceptée, car elle ne touche pas aux codes de la virilité. Dans le sport, et dans la société en général : je le vois pour travailler dans un magasin de carrelage, dans un environnement assez masculin… Président du club, je me suis également mis en retrait dès le début de ma transition. »
Pilotage. « Mes capacités physiques ont beaucoup diminué et, au dire de mon ancien passager, "le pilotage de Marie est plus doux et plus fluide que celui de Didier". Mentalement, la passion est intacte, mais les ressentis différents : je ne vois plus les choses de la même façon. Le côté compétition s’est encore atténué. Au-delà du sport, je suis aujourd’hui moins impulsive, plus cérébrale. Au lieu d’aller au conflit, je réfléchis, discute, parlemente. Avant, je me sentais comme sous une cloche, protégé par l’hormone masculine. »
(1) Dans cet entretien, l’accord masculin a été conservé pour la période précédant la transition de Marie-Laëtitia.
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