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Dr Jean-Jacques Pik : lutter contre le coronavirus et accompagner la sortie du confinement

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Membre de la commission médicale de l’Ufolep, le Dr Jean-Jacques Pik a participé dans l’Oise à la lutte contre la pandémie de Covid-19.

Dr Jean-Jacques Pik, comment avez-vous vécu les premières semaines de confinement et de lutte contre la pandémie de Covid-19 ?

Je n’ai pas été moi-même confiné parce que j’ai été appelé en renfort par mes anciens collègues de l’hôpital de Creil. L’Oise, et le sud du département en particulier, ont été un cluster de l’épidémie, et donc concernés très tôt par la fermeture des écoles et l’arrêt des activités sportives. Moi qui suis coureur à pied, j’ai continué à pratiquer sur tapis roulant. Mais j’ai effectué mon dernier entraînement de tennis de table dans mon association fin février.

 Vous avez rejoint une unité dite « Covid ambulatoire »…

Elle reçoit les gens venus sans rendez-vous parce qu’ils présentent des symptômes : fièvre, toux, essoufflement… Pour ne pas introduire le virus parmi les urgences générales, ils sont orientés vers ce service. L’un des problèmes était que nous avions deux fois moins de tests qu’il n’aurait fallu !

Vous-même avez développé les symptômes et été testé positif…

Oui. Je me suis donc mis en retrait. Mais mes collègues m’envoient des dossiers via un groupe WhatsApp.

Les personnes très sportives résistent-elles mieux au Covid-19 ?

Honnêtement, on n’en sait rien. Sans doute vaut-il mieux avoir une bonne physiologie cardio-respiratoire, mais il n’y a aucune certitude1. Des gens d’un bon niveau sportif ont effet développé des formes graves et sont mêmes décédés : quelques cas ont été montés en épingle par les réseaux sociaux et les médias. La raison est que cette maladie possède une composante immunologique qui peut survenir après la première phase d’invasion virale. Cette phase virale se traduit par une infection des voies aériennes supérieures, voire une petite atteinte pulmonaire. La deuxième phase ne se développe que chez certaines personnes après 6 à 8 jours : c’est l’organisme lui-même qui déclenche une réponse immunitaire extrêmement violente, laquelle conduit à une détresse respiratoire, avec d’autres pathologies suraiguës associées. C’est un tableau très complexe.

Au sortir du confinement, les Français n’auront sans doute qu’une idée : bouger. Faudra-t-il reprendre en douceur ?

Oui, surtout pour ceux qui ont été contaminés, en particulier s’il y a eu atteinte pulmonaire. Les courbatures étant l’un des symptômes de la maladie, on peut aussi se poser la question d’éventuelles lésions musculaires quelques mois après, comme on a pu l’observer à La Réunion après l’épidémie de chikungunya de 2016. Pour les autres, il s’agira de bien respecter les contraintes post-confinement afin de ne pas relancer l’épidémie, et de reprendre progressivement après une interruption d’activité sportive. Les animateurs multisports devront en tenir compte. Les compétiteurs devront être raisonnables eux aussi, et consacrer prioritairement la fin de saison à la remise en forme.

Et les personnes les plus éloignées de l’activité physique ?

Paradoxalement, elles seront peut-être moins impactées. Je conseillerai aux animateurs qui les encadrent de privilégier les pratiques d’extérieur, parce que les gens auront envie de sortir et que c’est le printemps, mais aussi pour éviter les transmissions résiduelles, qui demeurent possible dans un espace fermé.

Le programme À Mon Rythme de l’Ufolep peut-il être un outil de ce retour à la pratique physique et sportive ?

Oui, parce qu’il l’est déjà en soi. Peut-être faudrait-il seulement allonger un peu la première des trois étapes du programme. Et je conseille À Mon Rythme à tous les « rescapés » du Covid-19 !

Pour finir, pensez-vous qu’après cet épisode dramatique, les alertes sur les moyens de l’hôpital public seront enfin entendues ?

Je l’espère, parce que l’hôpital était déjà à l’os : à Creil, les urgentistes étaient en grève depuis un an, tout en assurant l’accueil des patients. Ce n’est pas faute d’avoir prévenu : le 17 novembre dernier, il y avait 50 000 médecins et infirmières dans la rue. L’hôpital a tenu parce que médecins et personnel soignant ont été d’un dévouement exceptionnel et que toutes les autres activités médicales, sauf urgence absolue, ont été déprogrammées. La sortie du confinement s’accompagnera de la reprise des activités habituelles, avec des patients dont l’état a pu s’aggraver : il n’y aura pas de temps de repos pour les soignants ! Aussi, quand j’entends que le directeur de l’Agence régionale de santé du Grand Est veut s’en tenir au plan d’économies envisagé avant la crise du Covid-19… Si les décideurs n’ont pas compris… J’espère que l’effort financier sur l’hôpital public, plus indispensable que jamais, fera consensus.

Propos recueillis par Philippe Brenot

(1) On observe cependant parmi les admissions en service de réanimation une sur-représentativité des personnes obèses ou en surpoids, avec parfois des pathologies associées, comme le diabète.


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