« Le grand saut », les tourments de Pierre Quinon en partage

Avec Le grand saut, le journaliste Renaud Dély réveille d’autres images d’athlétisme aux Jeux olympiques : celles du concours de la perche à Los Angeles 1984, qui vit le triomphe-surprise d’un frêle athlète au maillot bleu frappé du coq. Mais la vie de Pierre Quinon ne fut ensuite qu’une longue chute, jusqu’à sa défenestration volontaire, en août 2011, à l’âge de 49 ans.

Éditorialiste sur France Info et animateur de l’émission 28 minutes le samedi sur Arte, Renaud Dély ne propose pas une biographie classique mais intercale dans son récit sa passion juvénile pour celui auquel il s’identifia à l’âge de 13 ans après avoir suivi la retransmission nocturne de la compétition. Aux tourments du champion font écho le mal-être d’un rejeton d’une famille aisée mais brisée, entre père absent et mère dépressive. Le sport est son refuge, à travers la lecture assidue de L’Équipe et les figures amies de Platini, Noah ou Pierre Quinon.

Après avoir vécu son titre comme une imposture (en l’absence du superfavori Sergeï Bubka en raison du boycott de l’URSS), puis échoué à retrouver son niveau de performance, Pierre Quinon va s’employer à rater sa vie en dépit du soutien de sa femme, de ses enfants et de ses amis. Le fil est ténu, mais ces allers-retours entre les impasses du champion déchu et les petites affres d’un enfant sage, timide et solitaire sonnent juste. Un récit modeste et sensible où d’autres retrouveront eux aussi une part de leur enfance.

Philippe Brenot

Le grand saut, Renaud Dély, JC Lattès, 214 pages, 19 €.