Footporn, l'obscène surmédiatisation du ballon rond

Comparer le football d’aujourd’hui à la pornographie qui le concurrence sur les écrans : c’est assez bien vu. De ce parallèle naît aussitôt l’image de l’amateur compulsif qui, entre sa télévision, son smartphone et son ordinateur, visionne en continu des bribes de matches et clique sur les résultats, les commentaires et les capsules de buts comme d’autres, ou peut-être le même, consultent frénétiquement les vidéos des sites spécialisés censément interdits aux moins de 18 ans.

C’est de l’omniprésence du football, jusqu’à l’écœurement et la perte du goût du jeu, qu’il est ici question. Tant de matchs retransmis et tant images où tout est décortiqué et mis en scène avec force zooms et ralentis. Devant cette profusion et face un « produit » football si formaté, lissé et aseptisé par l’overdose médiatique et les enjeux financiers, quelle place demeure pour le rêve et « l’érotisme » qui naissaient autrefois de la rareté et de l’attente ? « Le football constitue désormais, à outrance, un culte de la performance, une affaire obligatoirement spectaculaire, basée sur l’image et les statistiques, reléguant loin, si loin, l’essence du jeu », pointe Laurent-David Samama, déjà auteur d’un dissonant Éloge de la défaite. Et de suggérer : à l’image du bodybuildé Cristiano Ronaldo, les footballeurs d’aujourd’hui ne sont-ils pas les plus proches cousins des acteurs pornos ? Là aussi, la référence fait mouche. Et même si à vouloir toujours coller à sa grille de lecture certaines comparaisons peuvent apparaître un peu tirées par les poils pubiens, la convergence pointée entre le foot et le porno interroge avec acuité les addictions de notre société contemporaine. Ph.B.

Footporn, Laurent-David Samama, L’Aube, 16 €.