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Un an de sport en pointillés vu de l’Ariège et des Yvelines

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Comment comités et associations se sont-ils adaptés aux restrictions de pratique ? Echanges croisés entre Camille Brunel et Ludovic Trézières, délégués Ufolep de départements à la géographie physique et humaine contrastée.

Camille Brunel et Ludovic Trézières, vous êtes respectivement délégués Ufolep de l’Ariège et des Yvelines. Vos comités ont-ils eu recours au chômage partiel après le confinement décrété fin octobre ?

CB : Non. À la différence des comités sportifs dont les activités se sont arrêtées avec leurs championnats, les élus de l’Ariège ont préféré me permettre d’avancer sur des projets en cours qui sont de vrais enjeux de développement : la Maison sport santé que nous espérons inaugurer officiellement en mars, plusieurs appels à projet politique de la ville, un autre concernant les centres d’accueil de demandeurs d’asile (Cada)... L’idée est d’être prêt à mettre en place ces actions dès la fin des restrictions de pratique, en profitant du report des subventions accordées.

LT : Dans les Yvelines, sur une équipe de 7 animateurs-développeurs, personne n’a été mis en chômage partiel. Et nous ne nous perdons plus dans d’inutiles gesticulations, comme au lendemain du premier confinement, où tout le monde voulait réinventer le « sport d’après »… Par la force des choses, nous faisons beaucoup moins d’animation, ce qui permet d’avancer sur des actions qui, le jour J, seront prêtes à se concrétiser. Pour notre projet de Maison sport santé, retenu par le ministère mais avec un budget insuffisant, nous sommes allés rechercher des financements complémentaires. Autre exemple : nous avons lancé avec la ville de Saint-Cyr-l’École un espace dédié aux femmes isolées, où le sport est au centre d’un projet autour du bien-être physique et moral, avec un volet d’accompagnement à la parentalité.

Vos associations et vos licenciés ont-ils répondu présent à la rentrée ?

CB : En Ariège, en dépit d’une saison 2019-2020 tronquée et des incertitudes sur celle à venir, la plupart des associations ont joué le jeu et seulement quelques unes se sont mises en sommeil. Nous en étions en janvier à 700 licenciés contre 1 000 à la même date l’an passé, sachant que nous avions terminé la saison à 1 333, légèrement en repli par rapport à la précédente. Si, au printemps, nous sommes en mesure de proposer un calendrier d’épreuves cyclistes, et si nous organisons le National de natation, nous pourrons espérer nous rapprocher de ce chiffre.

LT : Dans les Yvelines, nous nous situons dans les mêmes proportions, celle d’une baisse de 30 %, avec 6 400 licenciés contre 8 800. En gymnastique, notre première activité, les associations les plus fidèles se sont réaffiliées tout naturellement. Avec néanmoins une perte parmi les licenciés uniquement motivés par nos compétitions, ou les enfants dont les parents ont préféré attendre pour renouveler l’adhésion.

Avez-vous maintenu vos actions auprès des enfants et des publics prioritaires ?

C : Pas toujours, malgré des dérogations qui officiellement autorisaient la pratique sur prescription médicale. Nous sommes pris entre les directives gouvernementales et la réticence des collectivités à ouvrir leurs structures sportives, par méconnaissance ou frilosité, parfois en prétextant un manque de personnel de ménage. Difficile ensuite de justifier les financements reçus pour ces actions : « On ne peut pas faire », explique-t-on. « Mais puisque c’est autorisé », nous répond-on. Pas simple…

LT : Nous avons moins ce genre de problèmes : dans les Yvelines, la difficulté réside davantage dans le partage des équipements, qui sont en nombre insuffisant. Dans la mesure du possible, nous avons proposé des activités d’extérieur. Et aussi développé les cours de gym en visio, dans le cadre de nos partenariats avec l’Institut de promotion de la santé et Prévention retraite Île-de-France. Nous avons auparavant accompagné ce public âgé dans l’usage des outils informatiques et cela a très bien marché, avec 30 à 40 connexions par séance. Les seniors sont très en attente de se retrouver, et souvent se connectent bien avant le début pour discuter entre eux. Certains ont même pris l’habitude de se retrouver au domicile de l’un pour ces séances, tout en respectant la distanciation physique.

Les actions de formations ont-elles été maintenues ?

CB :  À l’exception de celles destinées aux volontaires en service civique, les formations PSC1 (premiers secours) ont été reportées. Pour le certificat de qualification professionnelle (CQP), la première semaine de formation s’est déroulée en janvier, et la deuxième était prévue mi-février…

LT : Les formations PSC1 prévues ont été réalisées, mais les CQP ajournés.

Le contexte vous a-t-il conduit à modifier durablement vos fonctionnements ? Et vos associations ?

CB : En mai, l’AG départementale en visio a été annulée faute de participants. Elle s’est déroulée en octobre, après avoir pris le temps d’expliquer aux dirigeants d’association comment se connecter et voter. Concernant les réunions du comité, la visioconférence a favorisé la participation d’élus qui d’habitude sont moins disponibles. Chez les associations, les gens préfèrent se rencontrer pour de vrai...

LT : Cela a changé la donne. Les outils numériques étaient peu utilisés : désormais ils le sont, sans tomber pour autant dans la réunionite aigüe. Les réunions sont plus faciles à programmer, plus courtes, avec un objet précis. C’est vrai à la fois pour les associations, les commissions techniques et le comité départemental : davantage de présence, et fini les réunions fixées à 21 h et qui s’achèvent à minuit ! Cela reste néanmoins compliqué pour une activité comme la pétanque, où la moyenne d’âge est élevée. Et aussi pour nos gros clubs de gymnastique, sur le point précis du vote en AG : pour respecter le principe « une licence, une voix » avec 300 adhérents, les outils existent mais sont coûteux.

Comment avez-vous entretenu le lien avec ces associations ?

LT : Nous n’avons eu ni plus ni moins de contact avec elles, et avec les outils habituels : téléphone, courriels, visites dans nos locaux…

CB : Idem…

Dans quel état d’esprit leurs dirigeants sont-ils après une année de sport en pointillés ?

CB : C’est variable… Certains rêvent que le virus disparaisse du jour au lendemain tant ils sont impatients de reprendre leur pratique et la compétition. D’autres se projettent prudemment sur septembre. Mais l’activité manque à tous.

LT : C’est dur pour nos gymnastes, qui n’ont repris qu’un mois avant de subir le nouveau confinement. Et les séances en visio, ça va un temps… Côté emploi, les éducateurs salariés bénéficient du chômage partiel, voire d’un salaire complet car les dirigeants ont de peur de les voir partir avec leurs sportifs vers une autre association. En revanche, sans activité, les étudiants bénévoles ne sont plus dédommagés et ne disposent plus de cet argent de poche si utile à leur âge. Mais la grande difficulté réside dans les demandes de remboursement de licence. Parfois, sous la pression des élus locaux, les associations ne se sentent pas en position de refuser. Par ricochet, elles nous demandent alors de faire le même effort…

CB : Il faut être dans le dialogue. Cela fut le cas lors d’une visioconférence commune à cinq associations employant le même éducateur sportif, au statut d’auto-entrepreneur. Les adhérents et leurs parents étaient invités à y participer. Nous leur avons expliqué la répartition du coût de la licence et pourquoi il n’était guère possible de la rembourser de but en blanc. Cela s’est conclu par un vote et par le choix de continuer à rémunérer l’animateur sportif, même dans l’impossibilité de proposer l’activité. Le côté humain est ressorti.

Propos recueillis par Philippe Brenot


En Jeu Ufolep 45, mars 2021
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